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"L’effet de halo". Vous préférez Alan ou Ben ?

A votre avis, quel est le poids de votre première impression sur l’avis que vous vous faites d’une personne ? Il est beaucoup plus important que vous l’imaginez. Cet effet « de halo » est bien connu en psychologie, et pourtant peu entré dans le langage courant. Explications.




Qui préférez-vous, Alan ou Ben ?

Voici Alan et Ben.

ALAN : intelligent – travailleur – impulsif – critique – opiniâtre – jaloux

BEN : jaloux – opiniâtre – critique – impulsif – travailleur – intelligent

Pour qui avez-vous spontanément l’opinion la plus favorable ?

89% d’entre vous ont une opinion plus favorable d’Alan*.


Vos réponses vont dans le sens des observations du psychologue Solomon Asch, qui fit l’expérience la première fois en 1946.

Mais pourquoi un tel plébiscite pour Alan, alors que Ben possède exactement les mêmes traits de caractères ?



Alan et Ben ont les mêmes traits de caractère... dans le désordre


Vous l’avez bien senti, tout dépend de l’ordre dans lequel ces traits de caractères sont présentés. Soyons plus précis : les premiers traits de caractère de la liste modifient le sens de ceux qui suivent.


La première impression crée une émotion (intelligent VS jaloux), qui selon sa nature, va teinter l’interprétation que nous faisons des prochaines informations que nous recevons.


En clair, nous considérons volontiers que l’opiniâtreté d’une personne intelligente (Alan) est justifiée, et cela force même le respect. Au contraire, l’intelligence chez une personne jalouse et opiniâtre (Ben) suscitera plutôt chez nous de la méfiance.


Notre pensée intuitive n’aime pas l'ambiguïté…


« Opiniâtre » est un adjectif ambigu, et nous l’interprétons inconsciemment d’une façon cohérente avec la première impression que nous ont fait Alan et Ben.


Lorsque nous portons un jugement intuitif, nous supprimons l'ambiguïté sans nous en rendre compte ! Surtout si nous disposons de peu d’information.

C’est ce qui explique que nous percevons intuitivement Alan et Ben très différemment, même s’ils sont décrits par les 6 mêmes adjectifs.



…pour une représentation plus simple et cohérente du monde

En psychologie, on appelle ce biais « l’effet de halo » : cette tendance à aimer (ou à détester) tout en bloc chez une personne, chez une entreprise et dans de nombreuses situations de la vie quotidienne.


Ce biais contribue à notre tendance inconsciente à nous représenter le monde plus simple et plus cohérent qu’il ne l’est réellement.


Souvenez-vous de l’expérience de Linda (lien vers l’article) : nous accordons plus d’attention aux informations qui renforcent la cohérence des histoires… même lorsque cela nous écarte de la logique et de la réalité.


Comment contourner l’effet de halo au quotidien ?


Dans notre quotidien, l’ordre dans lequel nous observons les caractéristiques d’une personne est souvent le fruit du hasard. Selon ce que nous découvrons de lui en premier, notre nouveau collègue Olivier peut très bien prendre des allures d’Alan, ou au contraire, de Ben.

Lorsque nous corrigeons une copie (pour les enseignants) ou révisons le rapport d’un collaborateur, la qualité de la première partie va influencer notre évaluation de l’ensemble des parties suivantes. Quand le début est bon, nous avons tendance à attribuer le bénéfice du doute aux éléments vagues ou ambigus qui viennent par la suite ensuite. Et inversement.


Pour éviter l’effet de halo lors de la correction de copies, il faudrait commencer par évaluer les réponses de tous les étudiants à la première question, inscrire les notes en dernière page pour ne pas s’auto-influencer, puis passer à la question suivante.


En bref, il s’agit de juger chaque question de la copie indépendamment des réponses aux autres questions. Tout comme il faudrait idéalement apprécier indépendamment chaque trait de caractère d’Alan et de Ben pour nous faire un avis général plus nuancé.


Transposé à la conduite de réunion, l’idée est simple : pour bénéficier de la diversité des connaissances et des opinions, avant d’aborder un sujet, chacun inscrit brièvement son avis sur un morceau de papier. Au lieu de cela, ce sont trop souvent ceux qui parlent en premier et avec la plus grande assurance qui façonnent l’avis du groupe… Une impression de déjà-vu ?

Sources

Solomon E. Asch, « Forming Impressions of Personality », Journal of abnormal and Social Psychology 41, 1946, p. 258-290.


Système 1, système 2, les 2 vitesses de la pensée, Daniel Kahneman, chapitre 7, p.128 à 133.



*Echantillon de 18 réponses suite au post LinkedIn du 30/03/2020


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